Kyoto/Osaka, Japon Juin 2008 Il s’agit ici du troisième communiqué des dirigeants religieux aux chefs d’État depuis le début des réunions du G8, il y a une décennie. Préambule : Vivre avec la Terre: Messages des religions du monde entier À titre de dirigeants et de membres de religions diverses, nous nous sommes rencontrés à Osaka pendant plusieurs jours, préalablement à la réunion des dirigeants des pays du G8. Nous nous sommes penchés sur nos préoccupations et sur nos engagements communs à faire face aux dangers et aux désastres environnementaux, aux défaillances économiques et sociales et aux crises politiques et morales. Tous ces facteurs défigurent la planète que nous nous partageons et divisent trop souvent ce qui devrait constituer nos communautés humaines interdépendantes. Nous avons réfléchi sur ces questions au milieu de sanctuaires et de temples séculaires, certains situés parmi des complexes industriels. Nous sommes également passés dans un refuge où des travailleurs sociaux et des bénévoles se dévouent à prendre soin de centaines de personnes sans emploi et sans abri, qui dorment sur des morceaux de carton ou dans des lits de fortune. Nous nous sommes décrit mutuellement de telles situations de prospérité et de dénuement dans le monde. Ensemble, nous avons voulu nous engager à adopter des modes de vie plus stables, à partager plus équitablement nos richesses et à traduire en action notre compassion pour les victimes des désastres, tant naturels que d’origine humaine, et des injustices à l’échelle mondiale. Notre engagement La tenue du sommet du G8 de cette année, à un moment où le degré de préoccupation à l’égard de notre environnement global a finalement atteint une masse critique dans la conscience populaire, revêt un caractère hautement symbolique. C’est que, malgré l’industrialisation récente de l’Asie, les traditions panthéistes, dharmiques et ancestrales des sociétés orientales demeurent un instrument pratique de mobilisation en faveur de l’environnement, en dépit des épisodes récents de rupture et de perte. Toutes nos traditions religieuses partagent cependant la conviction selon laquelle il faut accorder la priorité à la justice et à la défense des droits humains, y compris de l’égalité des sexes. Il est de l’intérêt de notre prospérité et de notre coexistence de prendre toutes les mesures possibles pour éviter les guerres. 1 Vivre avec la nature La crise environnementale universelle qui sévit actuellement a tellement accentué la peur dans le monde entier, que beaucoup se demandent sincèrement si nous pourrons survivre sur cette Terre. Le rythme d’extinction des espèces est de mille fois plus rapide qu’à l’ère de la disparition des dinosaures. Le sentiment d’urgence suscité par les changements climatiques est partagé par la déclaration conjointe des Académies des sciences du G8, selon lesquelles « Il faut que notre réaction passe à une étape supérieure, celle de l’action au palier mondial, national et local. Il faut que les intervenants locaux procèdent à l’évaluation des impacts et à la recherche de solutions. ». Nous consacrons donc nos ressources et notre pouvoir de mobilisation à la transition vers une société à faible émission de carbone et aux innovations qui, selon la réunion des ministres de l’Environnement tenue tout récemment à Kobe, seront essentielles à tous les pays pour leurs modes de vie et de production et leur infrastructure sociale (Sommaire du président). Ces innovations soutiendront les innovations technologiques utilisées. Nous nous proposons de condamner le matérialisme et le consumérisme, de freiner une cupidité qui peut aboutir à la destruction de la planète et de célébrer l’éclat de la vie en incitant nos frères et sŒurs dans la foi à prier pour le bonheur et l’épanouissement des autres et pour la compassion chez les puissants. 2 Diversité ethnique et religieuse : Un engagement Le cosmos, en tant que création divine, est paré de cette immense beauté qu’on appelle « diversité ». C’est dans les cultures ethniques et religieuses que celle-ci se manifeste le plus spectaculairement. Aucune autorité, religieuse comme séculière, n’a donc le droit de nier cet attribut sacré. L’humanité a répété, tout au long de son histoire, la même erreur d’annihiler la diversité en permettant au fort d’opprimer systématiquement le faible. Fort heureusement, notre sensibilité moderne reconnaît que ce comportement est inhumain et contraire à la Déclaration universelle des droits de l’homme des Nations Unies (dont on souligne cette année le 60e anniversaire). Nous sommes pourtant témoins, dans bien des cas et sur tous les continents, de situations où l’oppression sociale et politique viole totalement le principe de l’admiration due à la diversité divine – mentionnons, parmi les exemples les plus récents, ceux du Tibet et du Myanmar. Il existe également des problèmes communs tels que la promotion de l’égalité des sexes et l’élimination de l’écart entre riches et pauvres. Nous devrions cependant, plutôt que de blâmer les autres, nous sentir désolés de notre propre implication dans ces tragédies. Fermer les yeux devant les incidents tragiques qui affectent notre communauté mondiale, c’est se montrer irresponsable; ce serait, en bout de compte, nier le divin. On voit donc clairement ce qu’il nous reste à faire. Dans un esprit d’optimisme et résistant à tout sentiment de désespoir, des gens de foi s’engagent à faire partie de la solution, à prier et agir avec une compassion englobant toutes les victimes. Nous voulons être considérés comme des partenaires égaux dans la solution de ces problèmes si complexes. 3 L’Afrique : S’attaquer à la pauvreté L’Afrique continue d’être affligée par le néocolonialisme; il s’y manifeste diverses formes de pauvreté qui, à leur tour, créent et aggravent des problèmes environnementaux et politiques. L’avenir de l’Afrique peut s’orienter dans l’une ou l’autre direction : ses immenses ressources encore inexploitées font d’elle un continent ‘expérimental’ clé, en ce sens qu’elle peut décider de l’avenir de la race humaine au vingt-et-unième siècle La pauvreté africaine est à l’ordre du jour du G8 depuis 2005. Le premier ministre du Japon, Yasuo Fukuda, recevait récemment des mémoires où l’on affirmait que sans l’éducation, il ne saurait y avoir de développement économique en Afrique. Par ailleurs, l’Académie des sciences du Japon a affirmé au G8 actuel que c’est en les informant davantage qu’on incitera les populations à adopter des modes de vie qui faciliteront la transition vers une société à faible émission de carbone. Nous, dirigeants religieux, recommandons donc la création d’une Fondation de bourses permettant toute une série d’échanges d’étudiants entre pays africains et pays du G8, afin de contribuer à l’atteinte des objectifs qui font l’objet du présent Sommet du G8. Cette recommandation particulière reflète la nécessité de l’éducation pour le développement de notre communauté mondiale. Elle correspond parfaitement à la substance comme à l’esprit de Une participation juste : Un appel venu de Cologne, déclaration émise lors de notre sommet de 2007, qui mettait l’accent sur la nécessité de faire des Objectifs de développement du millénaire la base d’échanges entre les dirigeants religieux et politiques du monde entier. Conclusion : La présente proposition est encadrée d’un échéancier d’un an, dans les limites duquel notre forum surveillera les progrès accomplis dans les domaines 1, 2 et 3 ci-dessus. Il surveillera tout aussi minutieusement les progrès accomplis par ses propres organismes constitutifs dans l’enrôlement et l’éducation de leurs membres et présentera un bilan d’ici au sommet G8 2009 des dirigeants religieux, qui se tiendra au Canada. Tout comme bien d’autres, nous sommes préoccupés par la mentalité du court terme. Nulle part n’a-t-on encore vu de signe de la responsabilité et de l’obligation de rendre des comptes qui permettront de sauver l’avenir de nos enfants. La situation requiert de toute urgence l’attention de toutes les personnes en autorité et de tous les citoyens sérieux : lors de la prochaine ronde de ces réunions, qui aura lieu, en effet, dans un an à peine, il nous faudra évaluer, sans concessions, ce que nous avons fait pour notre monde blessé, en ces temps d’émergence planétaire. Toutes les religions tiennent chaque vie pour sacrée et étroitement liée aux autres. Les êtres humains, au degré le plus élevé de conscience du processus de la vie, ont la responsabilité de prendre soin du faible, du vulnérable, de l’infortuné. Voilà ce qui nous incite à vous demander de reformuler nos politiques gouvernementales de manière à les rendre plus équitables pour toute vie sur Terre.
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